Créatine et perte de cheveux : État des lieux scientifique

Créatine et perte de cheveux

Sommaire

La créatine suscite autant d’enthousiasme que d’interrogations dans le monde du sport et de la nutrition. Avec plus de 500 publications scientifiques validant son efficacité et sa sécurité, il reste une interrogation majeure : la créatine est-elle responsable d’une perte anormale de cheveux ? Plongeons dans une analyse approfondie, basée sur les dernières données scientifiques, pour démêler le vrai du faux.

La créatine : un acteur clé du métabolisme énergétique

Notre corps est une véritable usine à créatine. Cette molécule énergétique essentielle est naturellement synthétisée à hauteur de 1-2 grammes quotidiens, principalement par le foie, les reins et le pancréas. Ce processus complexe implique trois acides aminés fondamentaux : l’arginine, la glycine et la méthionine.

Le stockage et l’utilisation de la créatine suivent un mécanisme sophistiqué. 95% des réserves se concentrent dans nos muscles squelettiques sous forme de phosphocréatine. Cette forme stockée joue un rôle crucial lors des efforts intenses, permettant la régénération rapide de l’ATP (Adénosine TriPhosphate), le « carburant cellulaire » de notre organisme.

L’origine de la controverse : l’étude de 2009

La question du lien entre créatine et chute de cheveux trouve sa source dans une étude pivot publiée en 2009 par l’équipe de Van der Merwe. Cette recherche, menée sur des rugbymen universitaires, a mis en lumière des résultats surprenants concernant les niveaux de dihydrotestostérone (DHT).

Les chercheurs ont observé une augmentation spectaculaire de 56% des niveaux de DHT après une phase de charge en créatine (25g/jour pendant 7 jours), qui s’est maintenue à +40% durant la phase de maintenance (5g/jour pendant 14 jours). Ces résultats, bien qu’interpellants, nécessitent une analyse plus nuancée.

Mécanismes biologiques : une relation complexe

La DHT, forme plus active de la testostérone, joue effectivement un rôle central dans l’alopécie androgénétique. Cette hormone peut se lier aux récepteurs des follicules pileux, entraînant progressivement leur miniaturisation (voir alopécie androgénétique). Cependant, plusieurs éléments cruciaux méritent notre attention :

  • Les résultats de l’étude de 2009 demeurent isolés dans la littérature scientifique
  • L’augmentation de DHT observée restait dans les limites physiologiques normales
  • Aucune perte de cheveux n’a été directement constatée
  • Les niveaux de testostérone totaux sont restés remarquablement stables

Créatine et perte de cheveux une corrélation trompeuse ?

Un aspect fondamental souvent négligé dans ce débat concerne la coïncidence temporelle. De nombreux hommes commencent leur supplémentation en créatine précisément au moment où ils intensifient leur pratique sportive, généralement entre 25 et 35 ans.

Cette période correspond également à l’âge où l’alopécie androgénétique commence naturellement à se manifester chez les individus génétiquement prédisposés. Cette synchronicité peut créer une corrélation trompeuse entre la prise de créatine et l’apparition d’une perte de cheveux.

Et si c’était simplement lié à votre âge ?

Si vous observez une perte de cheveux depuis le début de votre supplémentation en créatine, il faut prendre du recul. Cette période pourrait simplement coïncider avec :

  • L’expression naturelle de votre patrimoine génétique qui détermine votre sensibilité à la calvitie
  • La manifestation progressive de l’alopécie androgénétique liée à l’âge

Solutions modernes et approche thérapeutique contre la perte de cheveux

La médecine capillaire moderne offre aujourd’hui un large éventail de solutions efficaces. Des traitements médicaux préventifs aux techniques chirurgicales avancées comme la greffe de cheveux, les options sont nombreuses et personnalisables.

Conclusion

L’analyse approfondie des données scientifiques actuelles ne permet pas d’établir un lien causal direct entre la supplémentation en créatine et la perte de cheveux. L’étude de 2009, bien qu’intéressante, présente des limitations méthodologiques importantes et n’a jamais été reproduite.

La créatine reste l’un des suppléments nutritionnels les plus étudiés et les plus sûrs, avec des bénéfices largement documentés pour la performance sportive et la santé globale. Néanmoins, comme pour tout complément, une approche personnalisée et réfléchie est recommandée.

Pour les personnes préoccupées par leur santé capillaire, la consultation d’un spécialiste permettra d’évaluer précisément leur situation et de proposer, si nécessaire, des solutions adaptées. La décision de prendre de la créatine doit s’appuyer sur une évaluation personnelle des bénéfices attendus par rapport aux inquiétudes potentielles, en tenant compte de sa prédisposition génétique et de ses objectifs personnels.

Sources: 

  1. Antonio J, et al. (2021). Common questions and misconceptions about creatine supplementation: what does the scientific evidence really show? Journal of the International Society of Sports Nutrition, 18:13. https://doi.org/10.1186/s12970-021-00412-w
  2. van der Merwe J, Brooks NE, Myburgh KH. (2009). Three weeks of creatine monohydrate supplementation affects dihydrotestosterone to testosterone ratio in college-aged rugby players. Clinical Journal of Sport Medicine, 19(5):399-404. https://doi.org/10.1097/JSM.0b013e3181b8b52f
  3. Branch JD. (2003). Effect of creatine supplementation on body composition and performance: a meta-analysis. International Journal of Sport Nutrition and Exercise Metabolism, 13:198-226. https://doi.org/10.1123/ijsnem.13.2.198
  4. Kreider RB, et al. (2017). International Society of Sports Nutrition position stand: safety and efficacy of creatine supplementation in exercise, sport, and medicine. Journal of the International Society of Sports Nutrition, 14:18. https://doi.org/10.1186/s12970-017-0173-z
  5. Olsen EA, et al. (2005). The importance of dual 5α-reductase inhibition in the treatment of male pattern hair loss: Results of a randomized placebo-controlled study of dutasteride versus finasteride. Journal of the American Academy of Dermatology, 53(6):1014-1023. https://doi.org/10.1016/j.jaad.2005.05.009


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